Projet de la loi de finances 2025 : Déséquilibre budgétaire flagrant et susceptible d’aggravation, l'économie tunisienne pourrait y perdre en résilience.
Amine BEN GAMRA (*)
Les dépenses de l’Etat pour l’exercice 2025 sont estimées à 59,828 milliards de dinars et sont susceptibles d’être révisées à la hausse suite au glissement du dinar et d’une probable hausse du prix de baril : la majeure partie de ces dépenses seront employées pour le paiement des salaires.
Les dépenses de l’Etat pour l’exercice 2025 sont estimées à 59,828 milliards de dinars et sont susceptibles d’être révisées à la hausse suite au glissement du dinar et d’une probable hausse du prix de baril : la majeure partie de ces dépenses seront employées pour le paiement des salaires.
Les recettes de l’Etat pour l’exercice 2025 sont estimées à 50,028 milliards de dinars dont 89% proviennent des recettes fiscales générées des contribuables et des sociétés légales (soit 45,249 milliards de dinars).
La hausse faramineuse de la dette publique, contre l’augmentation moindre des ressources engendre un déficit budgétaire de 9,8 milliards de dinars (susceptible d’aggravation).
Pire, à ce déficit budgétaire de 9,8 milliards de dinars s’ajoute le remboursement des fonds empruntés en principal de l’ordre de 18,203 milliards de dinars (9,734 milliards de dinars : dette intérieure & 8,469 milliards de dinars : dette extérieure).
Face à ce besoin de financement de l’ordre de 28 milliards de dinars susceptibles d’être révisées à la hausse suite au paiement des services de la dette (9,8 milliards de dinars : déficit budgétaire & 18, 203 : remboursement des fonds empruntés en principal), l’État tunisien prévoit de recourir massivement à l’emprunt pour équilibrer ses comptes.
Les emprunts internes, destinés à être contractés auprès des investisseurs locaux, devraient représenter un montant de 21,872 milliards de dinars. Parallèlement, l’État compte également solliciter des crédits extérieurs, à hauteur de 6,131 milliards de dinars, auprès d’organismes financiers internationaux ou d’autres États.
Ce projet de loi de finances soulève plusieurs questions et enjeux pour l’économie tunisienne. Un déficit budgétaire aussi important pourrait peser sur la stabilité financière du pays et menacer l’indépendance financière de notre cher pays.
En effet, la pression fiscale sur les contribuables et les sociétés légales devient insupportable, ce qui décourage l’investissement, diminue le pouvoir d’achat du citoyen et incite à l’évasion fiscale : augmenter les impôts, c’est augmenter les prix et donc l’inflation.
Au lieu d’augmenter la pression fiscale sur les contribuables, il serait judicieux de cerner la forte croissance de la masse salariale depuis 2011 qui est l'un des facteurs principaux de la détérioration des équilibres financiers de l'Etat. Le sujet de la révision des opérations de recrutements et d'intégration au sein de la fonction publique a été évoqué plusieurs fois au cours des dix dernières années, sans qu'aucune avance ne soit annoncée dans ce dossier, alors que les difficultés auxquelles fait face actuellement le pays ne souffrent pas d'avantages de report et de retard.
Notre cher pays devrait entreprendre des réformes structurelles pour une bonne gestion de la masse salariale qui pèse très lourd sur la finance publique, ce qui contribuerait à réduire le coût des emprunts et les besoins de financement de l'Etat.
De plus, le recours massif à l’emprunt pourrait augmenter le coût de la dette pour l’État et limiter les marges de manœuvre pour d’autres dépenses publiques.
Alors que la Tunisie affiche un double déficit et une dette élevée, alors que la croissance est anémique, l’emploi stagnant et l’inflation relativement élevée, alors que les perspectives sont soumises à des risques de dégradation majeurs liés principalement à la fragmentation géoéconomique grandissante et l'augmentation des mesures restrictives de politiques commerciale et industrielle. Il sera donc essentiel de suivre de près l’évolution de la situation économique et budgétaire de la Tunisie dans les mois à venir. Les décisions prises dans le cadre de l’exécution de ce projet de loi de finances auront des conséquences importantes sur les finances publiques et sur le développement économique du pays.
* Expert Comptable
Commissaire Aux Comptes
Membre de l'Ordre des Experts Comptable de Tunisie
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